Marshall Carter

J’étais assis sur une chaise grinçante, ligoté, et bâillonné…
Je me réveillais à peine, je ne voyais presque pas dans toute cette obscurité. Le flou de mes yeux se dévoilait peu à peu à mesures que je reprenais connaissance. Je portais mon regard autour de moi, je fus violemment frappé par la lumière qui se trouvait légèrement avancée au-dessus de ma tête en levant les yeux. Le cercle lumineux éclairait ma position, je commençais à me rendre compte de la situation. Mais j’étais trop affaibli pour paniquer, je me sentais ailleurs, et je n’avais que mes yeux pour me rendre spectateur de ce qui se passait. Je préférais être sourd à ce moment plutôt que d’écouter ce silence terrifiant, je n’entendais que ma respiration, et cette foutue chaise qui braillait son grincement dès le moindre mouvement. La pièce paraissait vide, je ne ressentais aucune présence lorsque j’entendis soudainement le son d’une voix calme et masculine. Elle raisonnait entre les murs, puis le silence retomba. J’attendais alors avec attention un nouveau son de voix de l’homme, qui était surement le responsable de l’état dans lequel je me trouvais. Il reparla encore, j’en étais presque soulagé pendant une fraction de seconde. Cette fois-ci j’avais réussi à distinguer les mots qui sortaient de sa bouche. Je reçu l’ordre de faire signe pour répondre à ses questions, un hochement de tête signifiait un « oui », tandis que je devais la remuer d’un côté à l’autre pour dire « non ».

Il commença par me dire comment il s’appelait… C’était Carter son nom, Marshall Carter. Il parlait calmement, c’était effrayant.
Et puis soudain, il s’est mit à me raconter quelque chose :


« J’ai fais ce rêve, un jour…

J’étais monté dans les hauteurs où Dieu vivait. Je l’ai vu… Le Tout Puissant regardait ce monde, le visage vide de sentiment. Et de ses hauteurs, il voyait tout, absolument tout. Il perçait l’obscurité et dévoilait l’ombre de la nuit, rien ne lui échappait. Je me demandais ce qu’il pensait de sa divine création. Tous ces êtres… Toutes ces Races… Est-ce que le désir de Dieu fut le résultat que l’on peut voir aujourd’hui ? Soudain il m’a regardé. J’ai croisé son regard, et je me suis retrouvé à sa place, les mains posées sur l’univers… C’était comme si j’étais forcé de voir les choses apparaitre devant moi. Elles étaient là, sous mon regard… Je n’en croyais pas mes yeux, c’était comme si l’on m’avait ôté le voile qui se tenait devant eux. Il n’y avait pas de mensonge dans tout ce qui défilait, c’était la vérité qui s’éclairait devant moi, entre mes mains qui s’agrippaient toujours à ce monde. J’absorbais chaque image, tout allait si vite. J’ai vu tout le mal des choses… J’étais sans voix… Ce que je venais de voir m’avait retourné l’esprit. Essoufflé, paumes des mains tournées vers le ciel, j’étais revenu soudainement à ma place initiale, face à Dieu. Il me fixa, puis s’éloigna dans la lumière. »

« Il m’avait amené jusqu’à lui pour me montrer ces images du quotidien, que lui, voyait chaque jour durant. Images et réalité qui nous étaient cachées, dissimulées dans l’ombre de la nuit, étouffée par la force et le pouvoir... »


Là encore, il s’était arrêté de parler. Il marcha, j’entendais à peine ses pas, je ne savais plus de l’un au suivant s’il avançait vers moi ou bien si il s’éloignait. Le silence s’abattait de nouveau dans la pièce. Et je n’eu pas le temps de comprendre ce qui m’arrivait… En une fraction de seconde, je me suis retrouvé avec une étrange lame à la gorge et l’homme venu de derrière me parla à l’oreille plus nerveusement que précédemment :

« Sais-tu pourquoi tu es ici ?! »

Je ne savais pas si je devais hocher la tête ou remuer d’un côté à l’autre. Mes yeux pleuraient, je tremblais… Je voyais la fin venir… J’étais terrorisé.
L’homme continua :


« Tu es ici, car je te considère comme l’auteur des images que j’ai vu… Tu es ici parce que j’ai compris ce que Dieu voulait dans ce rêve… Son regard me l’a dit, ces images m’ont tout révélé ! »


Lorsque je le regardais, je ne voyais même pas ses yeux. Il portait une tunique claire, à capuche. Je n’ai pas pu voir son visage, la lumière ne révélait que ses lèvres, qui continuaient de s’animer au rythme de la voix :


« J’espère que tu as pu comprendre les raisons de ton sort, aujourd’hui. »


Il prononça une phrase en latin et me trancha la gorge. Ma tête s’inclina, et le sommeil éternel m’emporta. Mon âme s’élevait, pendant que mon sang coulait. J’ai vu l’homme fermer mes paupières, et je l’entendis citer une prière à voix basse. Il me détacha les mains, enlevait mon bâillon, et me posa au sol avec dignité et respect. C’était presque comme si… C’était comme si il me rendait ma liberté, une fois que j’avais payé la dette que je lui devais. Je n’osais pas croire ce que je voyais, c’était… comme un rituel… Et il partit pour se fondre dans l’ombre, ne laissant aucune trace derrière lui. Il était de nouveau une silhouette que l’on apercevait à peine dans la nuit, marchant sous le silence qui recouvrait ses pas.
Je montais doucement dans la maison des morts, et je rejoignais les cieux, où je compris ensuite mon sort, et qui était cet homme, Marshall Carter.

« […] Hier, dans la nuit, un nouveau drame venait de se produire dans les rues du Quartier Sud.

En effet, nous venons d’apprendre la disparition d’Allan Twistaid, un chef de police haut placé. Le jour même, il avait donné l’ordre à ses hommes de prendre d’assaut les Rebelles qui manifestaient de nouveau devant la place publique du Quartier Est. Il venait surement de sauver des nombreuses vies auprès de nos citoyens, en repoussant les Rebelles chez eux à l’aide de canons à eau et de fumigènes. Il avait même réussi à faire arrêter plusieurs organisateurs de ce mouvement rebelle, sans qu’il n’y ait le moindre mort d’après nos informations tirées des hommes chargés de la situation.

Et c’est peu de temps passé après son action pour le bien de Sierra, que l’homme venait de disparaitre, il avait été vu pour la dernière fois à la station d’Asurium pour réapprovisionner son véhicule de fonction.
La Police recherche activement le disparu, en employant tous les moyens possible pour retrouver la moindre trace de leur chef, Allan T.

Marshall Carter »