Ce bar miteux du quartier Sud était enfumé par les cigarettes et d'autres produits plus illicites. Le bois était moisi, et le comptoir dégageait une odeur insupportable. Le serveur astiquait de gros verres sales, tandis qu'une petite lampe pendue au plafond par une corde usée se laissait balancer par le vent venu de la porte que quelqu'un avait oublié de fermer. Un grommellement venait sans discontinuer des piliers de bar, tandis que quelques curieux venaient jeter un oeil, prendre une boisson avant de repartir peu après.
Les deux ouvriers avaient l'habitude de ce décors. Ce bar était en quelque sorte leur second foyer, leur principale logement étant dans un état tel qu'ils se refusaient d'y retourner sauf en étant complètement saoul.
« C'est comme je te dit ! Ils ont emmené tout le monde, et les ont mis dans des navettes en direction de laboratoire secrets pour faire des expériences sur eux... Hic ! »
« Oh-là, tu divagues un peu, mon p'tit gars. L'Empire est p't'être pourri jusqu'à la moelle, mais il n'irait pas jusque-là. »
« Mouais. P't'être pas. Mais en tout cas, il y a quand même de belles enflures qui, elles, n'hésiteraient pas. Tiens, prend cet Eidôlon, par exemple. »
« Hieronymus Eidôlon ? »
« Yep. Cet enfoiré a fait une descente dans une planque de rebelle supposée à quelques pâtés de chez moi, ça va faire quelques semaines. Ses soldats ont tué tous ceux qui portaient une arme, sans sommation, et ont emmené les autres en camps de travail forcé ou en légion pénale. »
« C'est terrible... Pourquoi est-ce qu'il fait ça ? Il n'est pourtant pas de l'aristocratie militaire ni de la noblesse impériale. »
« Non, ses parents auraient été ingénieurs chez Artemis Extract. »
« Pas forcément les plus humanistes des parents. »
« Nop. Et en plus, il y a toute un tas de rumeurs qui courent sur son dos. »
« Du genre ? J'en ai entendu pas mal. »
« Bah, tu sais, le genre qui se retrouve chez tous ceux de l'Empire qui sont en première ligne et qui font souffrir le peuple. Qu'il prend plaisir à massacrer des civils, qu'il rôde sur les lieux de son futur méfait avant que l'assaut ne soit donné afin de s'imprégner de l'ambiance et confirmer la corruption, qu'il possède un don pour son métier, ou qu'il... »
« Un don ? Comment ça, un don ? »
« D'après ce qu'on m'a dit, et je le tiens de source sûre, si jamais un rebelle présumé met trop de temps à passer à table, il prend en charge l'interrogatoire lui-même. Les informations sont récupérés rapidement, mais la pauv' victime qui ressort n'est plus qu'un légume. Si jamais elle ressort. »
« C'est un monstre. Un boucher. »
« Ouais, j'te l'fait pas dire. Y'a pas mal de monde qui voudrait le tuer. Mais d'après c'qui s'dit, il aurait des pouvoirs surnaturels. Tu sais, de la télép... Télék... Ah, comment on appelle ça, déjà ? Il fait des tours avec son esprit. »
« C'est un psionique ? »
« Appelle ça comme tu veux, mais tu as compris l'idée. Il paraît que c'est à cause de ses parents et d'Artemis Extract, mais j'ai rien pu savoir de plus. »
« Encore que des rumeurs. Mais t'es quand même une vraie mine d'or d'information. Par contre, j'ai du mal à comprendre pourquoi il a rejoint l'armée. »
« Il veut faire carrière. Ca, c'est assez clair. Pourquoi ? Ca, c'est une bonne question. Il est de toute évidence dévoré par l'ambition, mais je me suis laissé dire qu'il y aurait une raison, pour ça. Tu sais, du genre, il connaît quelque chose que nous ignorons, et que depuis, il veut monter dans la hiérarchie pour sauver ses fesses le moment venu. »
« En tout cas, ça semble lui avoir réussi pour l'instant. Il a pris du grade rapidement, non ? »
« C'est vrai. Il a une sacré position de sous-off... Il est quoi, déjà ? Lieutenant ? »
« J'crois bien que c'est ça, oui. Lieutenant. »
« Il va avoir un peu de mal, en n'ayant aucun lien avec la noblesse et l'armée, à passer officier, si tu veux mon avis. »
« Il n'empêche, un roturier qui prend la route militaire et enchaine les grades de cette façon... Peut-être qu'il fait ça pour le bien de tous. Qu'il veut renverser l'Empire de l'intérieur. Qu'il aime le Peuple. Que c'est un héros. »
« Un héros ? Vous vous emportez, messieurs. »
Un grand homme aux yeux bleus comme la nébuleuse d'Alaric, qui se dirigeait vers la sortie, s'arrêta en passant à côté d'eux comme s'il venait de prendre leur conversation en cours. Sa coiffure impeccable et son allure digne contrastait avec tout le reste du bar. Les deux ouvriers se demandaient comment ils avaient pu ne pas le remarquer plus tôt.
« Et tu es qui, toi ? »
« Juste un homme qui essaie de faire son chemin dans l'univers. »
« Et donc, ce ne serait pas un héros du peuple ? »
« Non. Eidôlon se fiche bien de l'Empire, si vous voulez tout savoir. Qu'il serve l'Empereur ou n'importe qui d'autre, cela ne l'importe pas. Mais les forces impériales sont la principale source d'ordre à l'heure actuelle, et c'est donc elles qu'il sert. Autrement, je trouve que vous l'avez assez bien décrit.»
« Comment est-ce que tu sais qu'on parle de Hieronymus depuis tout ce temps ? »
« Oh, j'ai du entendre par inadvertance. Sur ce. »
L'homme continua à marcher vers la porte, tournant le dos aux ouvriers.
« Pourquoi est-ce que t'es venu nous dire tout ça, mon gars ? »
Arrivé au seuil de la porte, l'inconnu se retourna légèrement vers les deux hommes, et leur sourit chaleureusement.
« Pourquoi ? Et bien, je me suis dit que ce serait bien pour vous de savoir. Vu que vous allez mourir. »
Il sortit alors du bar, et continua dans la ruelle froide, alors que la nuit était déjà bien engagé. Les deux ouvriers le virent sortirent une sorte d'appareil de communication, et prononcer une courte phrase.
Quelques secondes plus tard, une grenade paralysante explosa à l'intérieur du bar tandis que des dizaines de soldats rentraient en furie par la porte et par les fenêtres.. Les compères, aveuglés et hébétés par le flash blanc, purent tout juste entendre le sergent de l'escouade impériale leur annoncer que tous ceux présent dans ce bar étaient des rebelles et qu'il avait été décidé qu'ils devaient être éliminé sans attendre, avant que les coups de feu ne commencent à résonner dans la taverne.
L'homme aux yeux bleus continuait de marcher dans la fraîcheur de la soirée. L'oreillette qu'il avait mise en sortant du bar bippa deux fois, et il sourit, tandis qu'il finissait de mettre ses gants de velours pour se protéger un tant soit peu de l'agression du froid.
« Voyez-vous, messieurs, » fit-il pour lui-même, « vous avez oublié un détail important dans votre description. Hieronymus Eidôlon sait couvrir ses traces. Vous auriez peut-être eu la vie sauve, si vous ne vous amusiez pas à propager des rumeurs sur mon dos. Sans rancune, les gars. »
Mettant les mains dans les poches de son imperméable, il continua son chemin jusqu'à trouver un transport de troupe garé à l'abris des regards. Il jeta son SMG-47 qu'il gardait caché sous son imper' à l'arrière du véhicule, puis embarqua.
« L'opération s'est bien déroulée, Monsieur ? » Lui souffla le pilote.
« C'était un véritable nid à rebelle. J'ai du donner l'ordre de tuer tout le monde. »
« Oh, je vois, Monsieur. Désolé pour vous. »
« Ce sont des sacrifices difficiles, mais ils servent notre Empire. Les autres transports sont en route pour récupérer nos escouades une fois que la Police sera sur place ? »
« Oui, Monsieur. »
« Bien. Conduisez-moi jusqu'à la caserne, et profitons d'un repos bien mérité après une nouvelle journée passée à servir notre Empereur révéré.
Sujet: Présentation de Hieronymus Eidôlon. 
Lun 9 Aoû - 12:24
), tourné d'une manière intéressante, sans compter les soucis que tu as eu pour l'écrire.
